3 questions à Marc Robert, Professeur à l’Université de Paris

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Observatoire des solutions | Débat d’idées | 3 questions à Marc Robert, Professeur à l’Université de Paris

Vous travaillez sur le CO2 dans une perspective de recyclage intégral dans le cadre du projet Mars.
Pouvez-vous nous expliquer l’enjeu de ce projet ?

Marc Robert : notre idée est d’utiliser le CO2 comme matière première renouvelable, en l’intégrant dans une boucle d’économie circulaire. Cela revient à utiliser des énergies renouvelables pour transformer ce CO2, par exemple, en carburant lequel formera à son tour du CO2 qui sera encore réutilisé. À ce jour, nous avons imaginé un petit dispositif qui reste au stade de proof of concept de laboratoire. C’est un mini-réacteur de la taille d’une tasse à café qui utilise uniquement de l’énergie solaire à température et pression ambiantes, un peu d’eau et un catalyseur à base de fer pour transformer le CO2 en méthane, lui-même renouvelable. C’est le principe de la photosynthèse qui fixe le CO2 à partir du soleil, mais nous l’appliquons à partir de catalyseurs, dont la particularité et l’objectif du cahier des charges sont d’utiliser des matériaux extrêmement abondants.

Du laboratoire au terrain, il n’y a qu’un pas ?

MR : Nous avons formé un consortium avec trois partenaires GRDF, GRTGaz et Terega, qui nous soutiennent sur des recherches en amont, mais qui ont également pour objectif de développer un pilote de laboratoire. À partir de là, nous pourrons envisager de passer à une échelle industrielle ou préindustrielle. Ce sont des perspectives de dix à quinze ans qui pourraient répondre aux applications dans la mobilité urbaine, à la génération de la chaleur… tout dépend de l’échelle à laquelle nous travaillons. L’originalité est aussi de mettre au point des technologies multi-échelle adaptées autant aux petits besoins locaux qu’à des usages industriels.

Votre solution a quelque chose du Graal qui permettrait de recycler le CO2.
Comment percevez-vous l’évolution de votre écosystème ?

MR : Sur le plan de la recherche d’abord, il faut savoir qu’un mouvement de fond absolument gigantesque est à l’œuvre au niveau international. Les acteurs se multiplient tant en Chine, en Europe qu’aux États-Unis. Les financements publics et de R&D explosent. Parallèlement, l’intérêt industriel s’accroît dans plusieurs secteurs bien au-delà du gaz. À brève échéance, notre objectif vise au développement d’un pilote de laboratoire dans un ou deux ans et au dépôt de brevets pour protéger nos avancées technologiques. Enfin, nous créons le partenariat préindustriel pour en faire une véritable technologie.

En savoir plus sur le projet MARS

Biographie expresse

Formé à l’Ecole Normale Supérieure (ENS Paris-Saclay), Marc Robert a obtenu une thèse en électrochimie en 1995 puis a poursuivi sa formation aux Etats-Unis (Ohio State University) avant de démarrer sa carrière académique en France en 1997. Il a été membre junior de l’Institut Universitaire de France de 2007 à 2012 et il en est membre Senior depuis 2017. Il dirige une équipe de recherche d’une vingtaine de personnes dans un laboratoire mixte entre l’Université de Paris et le CNRS, le laboratoire d’Electrochimie Moléculaire. Ses travaux portent sur la compréhension fondamentale de la réactivité chimique et sont maintenant centrés sur la réduction catalytique du CO2 en carburants par électrochimie et photochimie, un domaine dans lequel il a déposé plusieurs brevets et publié de nombreux articles internationaux.