Consultation publique sur les arrêtés relatifs à la fiabilisation du DPE : contribution de Coenove

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En vue de son opposabilité au 1er juillet 2021, des travaux de fond ont été engagés pour fiabiliser le Diagnostic de Performance Energétique (DPE). L’administration a ouvert une consultation publique sur les projets d’arrêtés venant encadrer la nouvelle définition du DPE et Coénove souhaite apporter les remarques suivantes

Concernant le mode d’expression du nouveau DPE

  • Oui à l’énergie primaire

Coénove tient tout d’abord à saluer le maintien de l’énergie primaire comme indicateur de référence de la performance énergétique des logements. Comme rappelé à de nombreuses reprises et au-delà du caractère de référence issu de la Directive DPEB, seule l’énergie primaire permet véritablement de prendre en compte l’impact des vecteurs énergétiques sur les ressources finies de notre planète. Par ailleurs, avec un coefficient de conversion proche des écarts entre les prix de l’électricité et du gaz, elle permet de garder un lien en termes d’ordre de grandeur entre les consommations conventionnelles et la facture payée par les ménages, ainsi que les écarts entre vecteurs énergétiques. Enfin, dans l’objectif de simplification et de lisibilité poursuivi par le Gouvernement, le maintien de ce mode d’expression est de nature à faciliter la compréhension des Français, habitués désormais à cet indicateur.

  • Oui à l’échelle carbone

Le classement prévu, calé sur une double appréciation de la performance énergétique et de la performance environnementale est une approche intéressante, la classe d’étiquette retenue étant celle de la performance la moins bonne des deux.

Ainsi, l’adjonction d’une échelle carbone à l’échelle énergie dans la nouvelle définition du DPE nous semble pertinente dans l’optique de l’atteinte de la neutralité carbone d’ici 2050. Cet indicateur complémentaire doit ainsi permettre d’accompagner les logements les plus carbonés, et notamment les logements fioul, dans leur mutation vers des énergies moins émettrices. Pour gagner en efficience, les aides publiques pourraient ainsi être ciblées vers ces catégories de logements.

  • En revanche, non aux seuils actuels

Sur l’étiquette énergie

La proposition actuelle de l’arrêté amène à une redéfinition à la hausse des plages des classes énergétiques, dans une proportion moyenne de 20 kWhep/m2.an. On pourrait penser que ce rehaussement des seuils correspond à la prise en compte des 5 usages versus 3 actuellement. Toutefois, si l’on se réfère aux nombreux exemples donnés lors de la réunion d’échange du vendredi 16 octobre 2020 à l’initiative de la DHUP, on constate très clairement que le nouveau moteur de calcul donne, dans la grande majorité des cas, une consommation totale sur 5 usages inférieure à la consommation totale sur 3 usages de l’ancien moteur de calcul (du fait notamment de la baisse des consommations d’ECS). L’augmentation des seuils énergies des classes A, B, C et D ne se justifie donc pas, si ce n’est pour desserrer la contrainte pour les seuls logements électriques existants et leur donner accès aux classes les plus performantes, les logements gaz eux ne pouvant en bénéficier, car contraints par le seuil carbone. Nous contestons donc ce rehaussement, sans cohérence ni justification, surtout dans un contexte de recherche d’efficacité énergétique, amenant de fait à une surévaluation des seuils sur les classes A, B, C et D de 20 à 30 kWhep et une diminution de la classe G de 30 kWhep, celui de la classe E restant identique.

Sur l’étiquette carbone

Si nous sommes en phase avec le principe d’une échelle carbone, les seuils proposés et plus particulièrement la frontière entre les classes B et C ne sont pas appropriés.

En effet, ce seuil fixé à 11kg conduit d’une part à exclure des classes A ou B tous les logements RT2012 alimentés au gaz naturel mais également la très grande majorité des logements gaz BBC rénovés à 80 kWhep/m2.an après travaux. En effet, une analyse de l’observatoire BBC Réno Effinergie montre que seuls 23% des logements rénovés suivants ce label resteraient dans les classes les plus performantes du DPE. Rappelons en effet que l’article 39 du projet de loi Climat-Résilience qualifiera les logements de la classe C comme « moyennement performants », qualification clairement non adaptée à des logements qui ont entrepris d’importants travaux de rénovation pour atteindre le BBC Réno et qui vraisemblablement ne devraient plus engager d’autres travaux de fond d’ici 2050.

Enfin, le seuil actuel vient casser la linéarité des classes constatée des classes G à C en introduisant une classe B particulièrement réduite entre 6 et 11kg alors que les autres classes s’établissent sur des plages bien plus larges.

Pourquoi une telle sévérisation, si ce n’est pour exclure des logements chauffés au gaz, même récents, des classes les plus performantes ?

2- Concernant les données d’entrée du moteur de calcul du DPE

Nous contestons les valeurs retenues pour le PEF et le contenu carbone de l’électricité qui valorisent artificiellement, en un claquement de doigts, les logements chauffés à l’électricité, sans qu’ils aient fait l’objet de travaux de rénovation.

Nous tenons à rappeler que ces 2 indicateurs ont fait l’objet de décisions arbitraires et sans fondement scientifique ou normatif transparent et incontestable à l’occasion des travaux sur la RE 2020 dans la construction neuve, dans le seul but de favoriser le chauffage électrique.

  • Non à un PEF à 2,3

Le seul argument utilisé pour justifier de l’imposition d’un PEF à 2,3 était qu’il s’appliquait à des bâtiments nouvellement construits qui seront encore présents dans 50 ans et plus. Un tel argument ne peut donc être utilisé pour le parc existant. La valeur actuelle de 2,58 est déjà sous-évaluée comme l’admet la DGEC et confère de fait un avantage significatif aux logements chauffés à l’électricité qu’il n’est pas nécessaire d’amplifier.

Rappelons que la norme NF EN 17423, publiée en novembre 2020, offre un cadre transparent pour déclarer les choix de mode opératoire visant à déterminer les PEF. A la lecture de cette norme, la méthode retenue par la France n’apparait pas adaptée pour traduire des impacts sur le mix énergétique. A ce jour, le choix d’un PEF à 2,3 n’a fait l’objet d’aucune justification de la méthode de calcul ni de ses références scientifique ou technique.

Par ailleurs, l’argument de l’harmonisation des coefficients et de la cohérence des politiques publiques visant à ne garder qu’un seul PEF, ne tient nullement face à la rigueur scientifique à laquelle doit se tenir le Gouvernement. Si tel était le cas, et si les secteurs de la construction neuve et de l’existant pouvaient se confondre, pourquoi deux méthodes distinctes (3CL et TH-BCE) pour calculer le DPE : ce seul exemple montre bien que les mêmes paramètres ne peuvent être appliqués à des situations radicalement différentes.

  • Non à un contenu carbone de l’électricité à 79g

Là encore et en toute rigueur scientifique, nous appelons à ce que soit pris en référence les derniers travaux issus du Groupe de Travail de la base carbone de l’Ademe dont le consensus devrait aboutir sur la valeur retenue pour la méthode saisonnalisée par usage d’environ 150g pour le chauffage. Il n’est, pas admissible de ne pas retenir un contenu carbone saisonnier par usage et donc de nier l’impact du chauffage électrique sur les appels de puissance hivernaux, problématique pourtant reconnue de tous y compris de RTE qui alerte régulièrement sur le sujet.

3- Concernant les informations figurant sur la fiche du DPE

  • Prendre en compte la PAC hybride dans la liste des équipements EnR

L’annexe 10 « Énergies Renouvelables » précise la liste des équipements à prendre en compte parmi les équipements en place (§1.1) ainsi que parmi les équipements pouvant être installés (§2.1), mais ne cite pas la PAC Hybride.

  • Intégrer dans le DPE une appréciation de la performance des équipements en place

L’exemple de DPE figurant en annexe fournit une appréciation de la performance de l’isolation et ce à deux reprises (en page 2 et en page 4), alors que l’appréciation de la performance des équipements en place de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire n’est jamais mentionnée. Si leur vue d’ensemble est donnée en page 4, il s’agit en fait d’une liste descriptive sans appréciation de la performance.

Il est essentiel que la performance des équipements en place soit évaluée sur la base des consommations en énergie primaire, par exemple sur la base de 4 niveaux (insuffisante, moyenne, bonne et très bonne)

4- Concernant la robustesse des informations disponibles et leur cohérence

  • Sur les recommandations de travaux

L’exemple donné en annexe distingue les travaux essentiels à réaliser en première étape, des travaux à envisager ultérieurement, ce qui en soit, semble être une démarche de bon sens si le propriétaire n’est pas en mesure d’engager une rénovation globale.

Cependant, proposer en première étape de remplacer la chaudière fioul par une PAC électrique et de réaliser l’isolation des combles, avant de réaliser des travaux d’isolation plus conséquents (qui sont à envisager dans une deuxième étape) est préjudiciable, car la PAC se retrouvera surdimensionnée en fin de parcours de rénovation et devra être remplacée pour s’assurer de son fonctionnement optimum et de sa durée dans le temps.

Ce cas de figure est d’ailleurs très bien décrit dans le récent document publié par l’ADEME (https://www.ademe.fr/renovation-performante-etapes – page 20) sous l’intitulé « Étude de cas : les impasses de la rénovation ».

La conclusion de ce cas de figure est la suivante : le couple (qui a changé sa chaudière fioul par une PAC en première étape) décide donc de ne pas réaliser ces travaux (d’isolation) et la facture énergétique de la maison reste à 1800€/an soit 3 fois plus que leurs voisins.

Le rapport précise par ailleurs en page 106, « conclusion pour les pompes à chaleur air-eau » :

  • Il n’existe pas à ce jour de modèles très modulants de PAC (puissance variant d’un facteur 10) pouvant s’adapter à l’ensemble des parcours de rénovation.
  • La PAC n’apparait pas comme une bonne solution pour la première étape de rénovation avant isolation.
  • La meilleure solution technique est l’installation de PAC modulante et à faible puissance (modulant de 2 à 7 kW environ) dans un parcours de rénovation où le système de chauffage est traité après ou en même temps que l’isolation de l’enveloppe (isolation quasi-complète du logement).

Le fait qu’il s’agit d’un exemple de DPE avec la précision « données fictives non représentatives » ne change rien à cet état de fait.

  • Modulation par zones géographiques

L’annexe 5 « Étiquettes Énergie et Climat » prévoit une modulation des valeurs de seuils des classes énergétiques et des classes climatiques des étiquettes E, F et G, pour les biens situés en zone climatique H1b, H1c et H2d et à une altitude supérieure à 800m.

  • Quelle en est la justification ? Pourquoi ne s’applique-t-elle pas à toutes les classes d’étiquettes ?

Exemples de coûts des travaux
Les coûts de travaux donnés en exemple sont très surprenants et sont décorrélés de la réalité des prix de terrain. Ainsi, les prix cités dans l’exemple de la mise en place d’une PAC complétée de l’isolation des combles pour un montant entre 9000 et 12 000€ sont inférieurs de 30 % au coût de la seule PAC !

De quelle base de référence les prix cités en exemple ont-ils été tirés ? Préciser la source et s’assurer qu’à défaut d’être opposables, ils soient représentatifs.

Récapitulatif des demandes et propositions de Coénove

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