Freins à la Transition Energétique : retour sur l’audition de Coénove dans le cadre de la mission confiée à l’Assemblée nationale

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Le 15 novembre dernier, Coénove a été auditionnée dans le cadre de la mission parlementaire « Freins à la Transition Energétique » par les rapporteurs et Députés Julien Dive et Bruno Duvergé. L’association était conviée à s’exprimer, aux côtés d’acteurs de la filière, lors d’une table ronde dédiée au bâtiment.

Avant de répondre à la question posée sur les freins, l’association a rappelé son adhésion à l’ensemble des objectifs de la Loi de Transition énergétique, qu’il s’agisse de la division par deux des consommations ou encore la réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050. Ainsi, à son niveau, Coénove souhaite contribuer à cette transition qu’elle conçoit comme un modèle allant vers plus de sobriété, plus de décentralisation, au plus près des territoires et faisant appel à plus d’énergies renouvelables.

Pour cette audition, Coénove a concrètement identifié et exposé 4 freins à la transition énergétique. Mais au-delà de ce constat, elle a également proposé des pistes d’amélioration.

Retour sur la contribution de l’association à cette audition et les leviers à activer :

Un foisonnement d’objectifs qui nuit à l’efficacité

Le premier frein identifié concerne le trop grand nombre d’objectifs qui sont poursuivis. Quand on regarde les textes relatifs à la Transition Energétique, il y a non seulement une multitude de textes mais également des dates de référence variable, tantôt 2012, tantôt 1990…ce qui n’apporte ni une grande clarté ni une grande lisibilité et est source de dispersion.

Pour Coénove, il n’y a véritablement que 2 objectifs prioritaires qui sont au fronton de la transition énergétique :

  • La baisse des consommations énergétiques mesurées en énergie primaire, prouvant tout l’enjeu de l’efficacité énergétique pour l’ensemble des acteurs
  • Le verdissement du mix énergétique, que ce soit par le recours à des énergies décarbonées mais également l’évolution d’énergies carbonées comme le gaz vers des énergies décarbonées dans les prochaines années.

Sans occulter les autres objectifs, il convient de les considérer comme des objectifs de moyens permettant d’atteindre les 2 macros objectifs pré-cités.

 

Le poids de la pensée unique électrique

Il est encore trop souvent avancé que le vecteur électrique va permettre de répondre à tous les maux… alors que la clé de la réussite de la Transition énergétique réside dans la poursuite d’un mix énergétique pluriel et diversifié dans lequel chacune des énergies va apporter sa contribution.

Un rappel pour illustrer ce propos sur le mix énergétique (et non pas sur le seul mix électrique puisque cette confusion demeure encore trop souvent…) : notre mix actuel présente un facteur 4 entre les besoins de puissance appelés l’été et ceux appelés l’hiver, ce qui entraine la nécessité, pour y faire face, de recourir à cette fameuse complémentarité des énergies. Pour rappel également, sur les hivers 2017-2018, l’électricité a permis de couvrir à peine 33% du besoin de puissance maximum quand le gaz a répondu à 45% des besoins de puissance.

On voit bien là tout l’enjeu qu’il y a de décarboner le gaz si l’on veut véritablement décarboner le mix énergétique, tout en préservant un mix énergétique diversifié, seul gage de la sécurité d’approvisionnement de notre pays à un coût acceptable pour nos concitoyens.

La verticalité des politiques publiques

Ce troisième frein est d’autant plus important qu’il ne permet pas d’atteindre pleinement une véritable transition écologique et solidaire qui se traduirait par la prise en compte des bénéfices transverses au-delà de la partie énergétique pour certaines solutions. Tel est le cas pour la méthanisation par exemple.

Sur un strict plan énergétique, le fait qu’il s’agisse d’une énergie renouvelable non intermittente et stockable est déjà d’importance, mais elle procure aussi des externalités positives de choix en termes de contribution à l’économie circulaire, de compléments de revenus pour la filière agricole mais également de modernisation des pratiques agricoles au travers de la production de digestat qui permet de remplacer progressivement les engrais chimiques.

On voit donc là qu’il y a de nombreux facteurs porteurs de valeurs pour l’avenir qui sont, du point de vue de Coénove, insuffisamment pris en compte dans les travaux de révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie notamment.

 

Le décollage beaucoup trop lent de la rénovation

Si ce frein a déjà été abordé, il est important d’y revenir dans la mesure où il représente un chantier essentiel pour véritablement rendre tangible la transition énergétique auprès des ménages. Le constat est sans appel : ce chantier de la rénovation ne décolle pas suffisamment.

Quelques remarques et suggestions : sur la forme déjà, en termes de pilotage, et l’OPECST l’a également pointé, l’absence d’indicateurs sur l’appréciation du marché et la mesure des résultats ne permet pas un véritable pilotage suffisamment motivant, au delà d’annoncer un objectif ambitieux de 500 000 logements rénovés par an. Nous ne savons pas dire à ce jour si nous sommes à 28 000, 32 000 ou 103 000 rénovations annuelles performantes…

Pour illustrer ce point, vient de sortir l’étude TREMI (Travaux de Rénovation Energétique en Maisons Individuelles) de l’Ademe qui est une bonne démarche en remplacement de l’étude Open. Notons que cette publication de novembre 2018 couvre les travaux réalisés entre 2014 et 2016, ce qui, en termes de pilotage, donne le sentiment de travailler dans le rétroviseur et pas véritablement dans la réactivité.

Sur le fond, ce que montre cette étude est que, s’il y a certes énormément de gestes et de travaux, en l’occurrence 5 millions, seulement 5% ont débouché sur des gains de 2 classes énergétiques et pour 75% n’ont pas permis de gain de classe énergétique. Dans ces conditions, l’objectif d’un parc 100% BBC rénové affiché à l’horizon 2050 est bien éloigné !

Au delà du constat et en termes de pistes et de solutions, trois enjeux :

  • Celui du passage à l’acte des ménages qui, pour Coénove, se traduit clairement par l’affichage net de l’intérêt d’une rénovation par étapes permettant d’embarquer la majorité des consommateurs a contrario de la rénovation globale dont le coût et la mise en œuvre ne peuvent être généralisés au plus grand nombre. Cela nécessite par contre de disposer d’un outil permettant d’accompagner dans le temps le suivi de travaux et pour cela le carnet numérique, tout juste réaffirmé dans la Loi ELAN, constitue une excellente réponse.
  • Privilégier dans le bâtiment la rénovation par filière, sauf pour l’énergie fioul dont l’arrêt est souhaité par le Gouvernement – position partagée par Coénove. Au delà de cet enjeu fort, il est attendu que chaque filière fasse des efforts pour progresser, apportant ainsi la solution la plus économique pour le consommateur.
  • Pour soutenir la rénovation, proposer un dispositif financier cohérent et pérenne pour donner de la visibilité aux ménages qui souhaitent s’engager dans la durée.

Pour retrouver l’intégralité de cette audition, cliquez ici.