Mission sur l’accompagnement et le financement de la rénovation des passoires thermiques : contribution de Coénove

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Début janvier, Olivier Sichel, directeur général délégué de la Caisse des Dépôts et directeur de la Banque des Territoires, s’est vu confier la charge de piloter une task force pour accélerer la rénovation des passoires thermiques. Acteur engagé sur le sujet depuis notre création en 2014, Coénove a souhaité transmettre sa contribution à la réflexion.

Comme rappelé dans la lettre de mission, la rénovation du parc de logements est une condition sine qua non pour la France de l’atteinte de la neutralité carbone en 2050. Malgré les nombreux soutiens engagés, notamment financiers, la massification de la rénovation et notamment l’éradication des passoires thermiques telles que souhaitées par le Gouvernement peine encore à pleinement s’enclencher.

Après consultation de ses membres, acteurs industriels fabricants d’équipements du génie climatique, organisations professionnelles de la mise en œuvre et de l’entretien maintenance de équipements ainsi qu’énergéticiens, Coénove souhaite apporter les propositions suivantes au débat, plus spécialement pour le parc individuel privé :

Sur le financement

  • Même si le financement ne constitue qu’une partie de ce qui permet de se lancer dans des travaux de rénovation, force est de reconnaître qu’il en constitue un moyen essentiel, pas toujours suffisant, toujours nécessaire. Deux mots-clés doivent guider les objectifs en matière de financement de la rénovation :
    • La performance, afin que les ménages constatent un gain même minime dans leur budget après intégration du financement des travaux qui viendront parallèlement améliorer leur confort ;
    • La souplesse : compte tenu de la très grande diversité des travaux réalisés et de leur montant et des ressources très variées des ménages concernés, seule une grande souplesse des financements proposés permettra de toucher le plus grand nombre. Au-delà du strict aspect taux, toutes les capacités de l’ingénierie financière doivent être mobilisées : tiers investissement, échelonnage du déblocage des fonds, etc …

Au-delà de ces remarques générales, trois pistes plus précises :

  • Attacher le financement à la pierre : Comme évoqué précédemment, pour être accepté, le financement de la rénovation doit être aussi indolore que possible sur la facture globale des ménages et idéalement générer un gain de pouvoir d’achat. Si l’on veut que cela soit compatible avec les sommes conséquentes en jeu, notamment en cas de rénovation globale performante et avec la capacité de financement des ménages, notamment les moins fortunés, il convient que les mensualités liées aux travaux ne dépassent pas l’économie de facture énergétique générée. D’où la nécessité d’allonger d’autant les remboursements, sur des durées pouvant régulièrement dépasser les 20 ans, ce qui est souvent peu compatible avec les durées d’occupation du logement et freiner l’acte d’engagement dans les travaux, il nous semble essentiel d’attacher le financement des travaux à la pierre et non au propriétaire à l’instant t.
  • Identifier clairement et structurer des prêts spécifiques Rénovation : aujourd’hui, sauf s’ils sont liés à des acquisitions immobilières, les « prêts travaux » sont intégrés dans les « prêts consommation », ce qui peut se comprendre historiquement pour de petits travaux d’aménagement, mais qui n’est pas à la hauteur du type de travaux et des montants concernés et débouche sur des taux prohibitifs. Ce fléchage vers des financements dédiés est également de nature à valoriser l’ensemble de la démarche.
  • Dynamiser et élargir la diffusion de l’Eco-PTZ à l’ensemble des établissements bancaires : outil de premier choix pour venir compléter un plan de financement, l’Eco-PTZ est à ce jour sous-utilisé. Insuffisamment rémunérateur aux dires des établissements qui le distribuent, sans en faire une promotion excessive, une remise en cause profonde doit être engagée pour en améliorer l’attractivité et élargir sa distribution. Par ailleurs, afin de s’assurer que la mensualité reste inférieure sur la durée à l’économie sur la facture (possible effet rebond, augmentation probable sur le moyen terme du prix des énergies,…), il faut qu’un mécanisme de revue et d’actualisation périodique soit mis en place.

Sur les autres aspects nécessaires à l’éradication des passoires thermiques

Cela a déjà été dit, répétons-le : c’est en donnant confiance aux ménages qu’on pourra aller dans la voie de la massification. La confiance touche notamment la qualité des travaux et l’assurance de réaliser des économies sur sa facture, en ayant de plus améliorer son confort.

  • Définir un chef d’orchestre des travaux : une rénovation efficace et performante comporte plusieurs lots et concerne plusieurs corps de métiers. Il est impératif, pour que d’un point de vue technique mais également organisationnel le chantier se passe dans les meilleures conditions, qu’une coordination efficace soit mise en place. Ce métier de maître d’œuvre en rénovation énergétique (évoqué dès les réflexions du Grenelle !) doit enfin émerger et son coût intégré dans le montant des travaux. Des formations ou spécialisations associées sont à déployer. Cette maîtrise d’œuvre définira entre autres la programmation des interventions et la qualité des entreprises.
  • Assortir les travaux d’une garantie : il est vrai qu’une garantie d’économies constatées sur facture revêt une grande complexité et nécessiterait des hypothèses de calcul la rendant difficiles à manier. Commençons par une garantie de bonne fin de travaux à partir d’un audit énergétique identifiant des travaux permettant un gain contractuel d’étiquettes et le contrôle des travaux effectivement réalisés.
  • Ne pas limiter la rénovation performante à la rénovation globale : restons pragmatique : si la rénovation globale se veut performante, ce n’est pas la seule voie comme le rappelle la très récente étude[1] publiée par l’Ademe/Dorémi/Enertech. Il est tout à fait possible d’atteindre la performance BBC Rénovation en procédant jusqu’à 3 étapes et de bien choisir ses étapes. Par exemple, une rénovation peut nécessiter de commencer par le remplacement d’un générateur de chauffage hors service en pleine période de chauffe. Cette étude montre alors très clairement que les chaudière gaz THPE très modulantes ont plus que les autres systèmes (PAC, Chaudières bois, fioul) la capacité à s’intégrer à la première étape d’un parcours de rénovation, dans dégrader la performance finale. Cela peut avoir l’avantage de lisser ou a minima d’espacer les besoins de financements et de les faire coïncider avec les capacités des ménages.

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  • Mission sur l’accompagnement et le financement de la rénovation des passoires thermiques

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