3 questions à Bruno Millienne, député des Yvelines et vice-président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

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En responsabilité de certains groupes de travail du projet de loi Industrie Verte et des travaux préparatoires de la prochaine Loi de Programmation Energie Climat (LPEC), le député et vice-président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, Bruno Millienne, a répondu aux questions de Coénove.

Concernant le projet de loi Industrie Verte, quels sont les grands enjeux du chantier que vous pilotez sur le « Produire, commander et acheter en France » ?

Si le projet de loi en tant que tel intègre pleinement le sujet très important du verdissement de la commande publique, la proposition majeure, selon moi, de notre groupe de travail se situe au niveau réglementaire avec la mise en place d’un standard triple E « Excellence environnementale européenne ».

Face au maquis de normes environnementales existantes et à venir, ce standard ambitionne d’offrir une approche cohérente, en regroupant les meilleurs dispositifs environnementaux existants sous une bannière unique, sans en faire disparaître l’existence propre. Il s’agira d’un « standard volontaire », proposé aux entreprises produisant en France et en Europe dans un premier temps et qui concernera les sites de production et/ou les process industriels, il devra s’apprécier par taille d’entreprise, par secteur, et de façon dynamique.

Ce standard a plusieurs objectifs : tout d’abord, valoriser l’excellence environnementale (notamment celle liée à l’utilisation d’une source d’énergie décarbonée), ensuite, inciter et accélérer la transition des sites industriels puisque le standard devra permettre d’attirer beaucoup plus facilement les investissements verts, la commande publique et privée, voire les aides publiques. Il vise enfin à sortir d’une seule logique de « reporting » et à constituer un réel tableau de bord de la décarbonation des entreprises, accompagnée et valorisée.

Vous êtes également responsable du Groupe de Travail « Efficacité énergétique » des travaux préparatoires de la prochaine LPEC (Loi de Programmation Energie Climat). Quel est l’agenda et le cadre de travail que vous vous fixez ?

Avec une étude de la loi de Programmation Energie Climat (LPEC) prévue à l’automne 2023, l’agenda fixé par Madame la Ministre Pannier-Runacher est contraint dans le temps. La composition des groupes de travail a été fixé dans le courant du mois de mai dernier et j’ai été nommé copilote du groupe de travail 2 centré sur l’efficacité énergétique avec Jean Revereault, Vice-président du Grand Angoulême et Vice-président d’Intercommunalités de France en charge de des Transitions écologiques.

Tous les groupes de travail sont faits sur le même modèle : un parlementaire et un élu local désigné par une association. Nous devons rendre nos travaux à la fin du mois de septembre 2023 mais un groupe de travail « bouclage » doit regrouper les propositions en amont de cette date : la date de rendu des travaux du groupe de travail 2 est donc fixé à mi-septembre.

Rappelons ce qu’est l’efficacité énergétique : c’est consommer moins d’énergie pour un même usage en améliorant les performances énergétiques des installations et des appareils.

Mais cela touche tous les secteurs. Nous avons donc décidé de centrer notre travail sur le bâtimentaire et sur les mobilités, tout en nous laissant la possibilité d’élargir notre propos en fonction des différentes remontées des tables ronde et auditions organisées.

Quelle est votre vision du rôle que les gaz renouvelables doivent jouer dans la décarbonation du secteur des bâtiments ?

Les gaz renouvelables sont traités par le groupe de travail numéro 4 dédié à la production de chaleur et d’énergies bas carbone et copiloté par Pierre Cazeneuve et Jean-Baptiste Hamonic.

Il y a cependant un lien important avec notre propre groupe de travail, notamment sur la question des chaudières à gaz. Des négociations sont en cours aujourd’hui pour décider de l’avenir des chaudières à gaz. Si cela peut se défendre pour les bâtiments neufs, une interdiction à court ou terme pour l’ensemble du bâtimentaire paraît hautement irréalisable pour plusieurs raisons :

  • Des raisons financières : une pompe à chaleur coute 3 à 4 fois plus cher à l’installation.
  • Des raisons techniques : il est difficile de se passer d’une chaudière à gaz dans le collectif à chauffage individuel.
  • Des raisons industrielles : la France fabrique la grande majorité des chaudières à gaz sur son territoire alors que les pompes à chaleur proviennent majoritairement de Chine.

Néanmoins, la production de biogaz ne pourra pas atteindre les besoins actuels ni même ceux estimés par la DGEC : il faudra donc prioriser les usages de la biomasse en fonction des alternatives disponibles dans chaque secteur. Dans le même temps, nous ne pourrons à court terme augmenter drastiquement notre production électrique. Les EPR2 ne seront opérationnels avant au moins 2035 et nous devons installer annuellement deux fois plus d’ENR qu’aujourd’hui pour faire correspondre l’offre et la demande d’électricité prévue en 2030.

Je défends donc une transition programmatique et efficiente.

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