Accélérer la rénovation énergétique : un mélange subtil de signal prix, de normes et d’incitations de l’Etat
Publié le« Rénovation thermique : une solution au chômage ? », tel est le thème ambitieux que souhaitait aborder l’Association Coénove lors de ce deuxième afterwork qui se tenait sur Paris le 29 mars dernier.
La question faisait échos aux récents propos du Président de la République annonçant un programme de grands travaux pour la rénovation des bâtiments et visant à faire de la cause du climat un chantier pour l’emploi.
Un débat a ainsi été organisé sur les leviers financiers nécessaires à la mise en œuvre de ce programme et ses conséquences attendues sur l’emploi dans le bâtiment, autour de M. Emmanuel LEGRAND, Directeur du département Energies renouvelables à la Caisse des Dépôts).
Animé par le Président de l’association, M. Bernard AULAGNE, ces échanges ont regroupé industriels, membres de ministères, associations et bloggeurs.
Le débat a été ouvert par M. AULAGNE, rappelant que la France est encore loin de l’objectif des 500 000 logements rénovés et que le « financement reste le nerf de la guerre quand on parle de transition énergétique ».
La parole a ensuite été passée à M. LEGRAND qui a souligné que cet objectif politique ambitieux de rénovation du parc correspond à un besoin de financement estimé entre 7 et 8 milliards d’euros. Il a expliqué que « la rénovation peut être motivée tant par des économies d’énergie que par le confort ou encore la valeur verte du logement » (appréciation du logement de l’ordre de 0 à 4%).
Toutefois pour M. LEGRAND « même s’il y a eu de vrais progrès avec la qualification RGE et le cumul du CITE/ éco-PTZ, il faut continuer de créer des signaux incitatifs pour massifier les travaux de rénovation ». Un premier signal pourrait être celui du prix de l’énergie. A ce jour le faible coût de cette dernière n’incite pas à la réalisation de travaux de rénovation. Un signal Norme serait également bienvenu, via les labels techniques et l’accompagnement des propriétaires pour lesquels le financement des travaux n’est pas toujours un obstacle.
Rappelant le rôle de la Caisse des Dépôts, comme « opérateur privilégié pour le financement de la transition » selon les propos du Président de la République, M. LEGRAND a indiqué que « la loi de transition énergétique avait mis la France sur la trajectoire d’un mix énergétique plus équilibré mais qu’une maîtrise des consommations restait attendue. ». Des dispositifs incitatifs ont été mis en place (CITE, EcoPTZ, subventions…) mais leur variabilité et leur coût dans le budget de l’Etat n’en font pas des solutions pérennes. La Caisse des Dépôts propose de sortir de ce mécanisme en trouvant des outils de financement qui ne seraient pas fondés sur les seules ressources de l’Etat.
Le modèle allemand où les banques financent la rénovation sur les marchés financiers est évoqué et nécessiterait, comme le rappelle M. LEGRAND de « créer un fond de garantie pour que les banques puissent proposer des prêts à la rénovation compétitifs ».
A ce titre, instaurer une nouvelle classe de prêt bancaire spécifique visant à financer les travaux de rénovation serait une avancée. Intermédiaire entre le prêt immobilier et le crédit à la consommation, il répondrait à la fois aux attentes des banques en termes de garanties et à celles des propriétaires au niveau du taux et de la durée d’emprunt.
Le tiers-financement porté par les collectivités et le micro-crédit font aussi partie des idées avancées par la Caisse des Dépôts qui multiplie les propositions pour faire face aux différentes situations rencontrées sur le terrain.
En termes d’emploi, l’émergence du nouveau métier de rénovateur énergétique évoqué lors du Grenelle est encore loin, même si la Caisse des Dépôts estime à 24 000 le nombre d’emplois créés par la rénovation énergétique.
Si les pistes de financement ne manquent pas, reste maintenant à les mettre en œuvre durablement pour que l’ensemble des acteurs ait le temps de se les approprier, telle fut la teneur des débats animés de cet afterwork.