Coefficient de conversion de l’électricité : une décision délétère et une consultation en trompe l’œil

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Alors qu’une consultation publique vient d’être lancée sur la révision du coefficient de conversion Énergie primaire/Énergie finale (Ep/Ef) de l’électricité, Coénove s’interroge sur la sincérité de la démarche et déplore un simulacre de concertation, alors même que le Premier ministre a déjà annoncé assumer sa décision de baisser le coefficient de 2,3 à 1,9.

Une décision techniquement contestable, socialement injuste et environnementalement contreproductive

Les conséquences de la révision du coefficient Ep/Ef de l’électricité, pour l’instant non évaluées de manière transparente, sont pourtant nombreuses et lourdes de risques.

Coénove rappelle son opposition à cette mesure arbitraire qui :

  • Détourne un indicateur scientifique à des fins politiques ;
  • Décrédibilise le Diagnostic de Performance Energétique (DPE) et désoriente les ménages ;
  • Fait sortir artificiellement 850 000 logements du statut de passoires énergétiques sans travaux, sans baisse de facture et sans amélioration du confort pour les occupants ;
  • Accélère une électrification non maîtrisée du secteur des bâtiments, au détriment de la sécurité d’approvisionnement du pays ;
  • Alimente l’instabilité réglementaire et freine la dynamique de rénovation.

Une consultation tardive, opaque et illusoire

Lancée en plein cœur de l’été, la consultation publique sur la révision du coefficient de conversion de l’électricité intervient alors même que le Premier ministre a déjà annoncé que la décision était actée et assumée. La portée réelle de cette consultation semble alors très limitée.

« Le gouvernement fait d’abord le choix d’une décision arbitraire, en modifiant unilatéralement le coefficient Ep/Ef, sans se fonder sur des réalités scientifiques, ni mesurer les impacts réels sur la précarité énergétique et la décarbonation des bâtiments. Et voilà qu’il tente ensuite de faire mine d’écouter les acteurs, en lançant une consultation publique en plein été, sans transparence, ni véritable débat de fond. Ce simulacre de concertation interroge autant sur la méthode que sur l’intention », commente Jean-Charles Colas-Roy, Président de Coénove

De nombreuses questions face à une telle décision

Le choix d’un coefficient à 1,9 techniquement discutable

  • Pourquoi le coefficient évolue-t-il à la baisse, alors que le calcul scientifique montre qu’il devrait évoluer à la hausse ?
  • Pourquoi les conclusions de la note de cadrage réalisée en 2019 dans le cadre de l’expérimentation E+C-, ayant permis d’établir la valeur du coefficient à 2,3, sont-elles remises en question ?
  • Pour quelles raisons la moyenne européenne, déconnectée des réalités du mix électrique français, composé majoritairement d’électricité nucléaire décarbonée, serait-elle une valeur adaptée pour la France ?
  • Alors même que les pertes de chaleur des centrales nucléaires ont obligé l’arrêt ou la modulation à la baisse de quelques réacteurs pour éviter le réchauffement excessif de certains cours d’eau, pourquoi le gouvernement ne suit-il pas l’analyse de la Cour des comptes qui rappelle, dans son rapport sur la mise en œuvre du DPE, de juin 2025, que « la production d’électricité, qui a lieu majoritairement par combustion ou réaction nucléaire, offre des rendements très faibles : pour produire 1 kWh d’électricité, il faut environ 3 kWh d’énergie primaire, avec 2 kWh de chaleur générés évacués directement dans la nature et l’existence d’un coefficient de conversion en énergie primaire plus défavorable pour l’électricité est donc le reflet de principes thermodynamiques » ?

Un alignement contestable et biaisé sur une valeur européenne

  • Si la mesure s’applique au nom d’une harmonisation européenne ou d’une plus grande interconnexion au niveau européen, pourquoi est-elle prise sans une mise en cohérence avec le contenu carbone de l’électricité en Europe, bien plus élevé qu’en France ?
  • Pourquoi cette évolution contestable serait-elle valable dans le DPE et pas dans la Règlementation Environnementale pour les bâtiments neufs ?
  • Cette approche partielle n’introduit-elle pas un biais dans les politiques de décarbonation et ne remet-elle pas en question la cohérence d’ensemble des outils d’évaluation énergétique ?
  • Le coefficient Ep/Ef va-t-il encore évoluer à la baisse (par exemple à 1,6) dans les mois ou années à venir, suivant la mise à jour des calculs européens ? Ainsi, ne faudrait-il pas analyser les conséquences délétères d’une évolution encore plus baissière de ce coefficient ?

Une réforme sans véritable étude d’impact

  • Des études d’impacts détaillées ont-elles éclairé la révision proposée ? Si oui, pourquoi ne sont-elles pas rendues publiques ?
  • Quels seront, à court et moyen terme, les effets de cette mesure sur la pointe électrique hivernale ?
  • Quel sera l’impact sur les prix de l’immobilier et sur l’évolution des loyers de ces 850 000 passoires énergétiques, alors qu’aucuns travaux n’auront été réellement effectués ?
  • Le gouvernement s’engage-t-il à suivre les avis des instances consultatives qu’il a sollicités, en particulier ceux du CSE (Conseil supérieur de l’énergie) et du CSCEE (Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique) ?

Un recul social préoccupant

  • Comment cette mesure contribue-t-elle concrètement à sortir les ménages de la précarité énergétique, notamment ceux dont les logements passeraient de F à E sans travaux ?
  • Si ces logements ne sont plus considérés comme passoires énergétiques, quelles seront les conséquences sur leur éligibilité aux aides ou dispositifs de rénovation ?

Coénove appelle à une vraie consultation, précédée :

  • d’un avis de l’OPECST (Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques) pour éclairer le débat ;
  • d’une étude d’impact complète et publique avec la publication d’une analyse spécifique de RTE sur la gestion de la pointe électrique hivernale et la sécurité d’approvisionnement du pays, à 5 et 10 ans ;
  • d’un débat parlementaire sur les conséquences sociales et environnementales de cette réforme.

Coénove rappelle également l’urgence de garantir un cadre stable, lisible et cohérent pour accélérer la rénovation énergétique des bâtiments.

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